lundi 6 février 2017

EMBRASSE-MOI COMME TU M'AIMES / Film réalisé par André Forcier

THÉÂTRE OUTREMONT, Montréal, le 6 février 2017

Embrasse-moi comme tu m'aimes, Québec, Canada, 2016, 106 minutes. R. : André Forcier ; Sc. : André Forcier et Linda Pinet. Prix du meilleur film canadien et de l'innovation au Festival des films du Monde de Montréal en 2016.

Reconnu pour la fantaisie et l'onirisme qui émaillent ses films, André Forcier a le don de proposer des univers particuliers, surréalistes, empreints d'érotisme brûlant et d'humour typiquement québécois.

Le spectateur québécois y reconnaîtra bien souvent un univers par trop familier, avec sa poésie et sa nostalgie, mais aussi avec les tics et les clichés de son époque, qu'une lecture trop familière, trop peu distanciée, dessert jusqu'à un certain point.

Situant la relation tumultueuse et amoureuse entre les jumeaux Berthe et Pierre Sauvageau, dans le Montréal du début des années 1940, au moment de l'entrée en guerre du Canada aux côtés de la Grande-Bretagne, Forcier aborde une multitude d'enjeux : amour incestueux, colonisation, pauvreté, lutte des classes, ignorance, alcoolisme, cléricalisme, sexualité, inceste parental, homosexualité, violence, etc.

Le fort potentiel de ces thèmes, alliés à une direction d'acteurs remarquable et à une reconstitution d'époque réussie, auraient pu, tirés plutôt vers le drame psychologique, proposer une œuvre bouleversante, dérangeante... Si on ne peut reprocher au cinéaste son choix de la fantaisie et de l'humour, on ne reprochera pas davantage au spectateur de regretter que le film demeure à la surface des réalités abordées, sans parvenir à susciter une véritable émotion. Si Forcier bouscule et questionne les clichés liés au travail et à la sexualité féminine, il tombe, par contre, à pieds joints dans le fossé des clichés liés à l'homo quebecensis : le père ivrogne et dénaturé, la mère dévote et soumise, le curé homosexuel, le mafioso au grand cœur, la putain généreuse, le policier borné et ridicule, etc.

André Forcier n'en demeure pas moins un grand cinéaste, au grand cœur et aux intentions fortes, mais peut-être trop collé à son époque, au besoin de se faire plaisir avant tout...

 5,5/10

Mots-clés : ˝Embrasse-moi comme tu m'aimes˝, André Forcier, ˝Film d'époque˝, ˝Cinéma québécois˝