lundi 26 février 2018

THE SQUARE / Film réalisé par Ruben Östlund

THÉÂTRE OUTREMONT, Montréal, le 26 février 2018

The Square, Suède, Allemagne, France, Danemark, 2016, 142 minutes. R. et Sc. : Ruben Östlund. Palme d'or au Festival de Cannes 2017.

À l'image des nombreux escaliers en colimaçons qui hantent le parcours du « héros », Christian, conservateur d'un musée d'art contemporain, le spectateur, dans un premier temps, risque d'être perdu ou, à tout le moins, perplexe devant les épreuves que ce « héros à la triste figure » devra affronter :

« Au plan social, une stratégie périlleuse de récupération sauvage du téléphone qui a échoué dans une cité. Au plan professionnel, la commande d'une campagne de communication « clivante » confiée à un cabinet de jeunes abrutis prétentieux dirigés par un vieux beau.

Au plan mondain, un dîner de gala avec un faux singe mais un vrai performeur russe qui terrorise l'assemblée des VIP. Au plan sexuel, une aventure grotesque avec une journaliste américaine et un vrai singe. »

[...]

 Au plan familial, le degré zéro de la communication d'un père divorcé avec ses deux fillettes qui lui rendent visite. Et autant de catastrophes à la clé. »

Jacques Mandelbaum,  « « The Square », Palme d'or à Cannes : un triste héros des temps modernes », Le Monde, 18 octobre 2017.

Si la Palme d'or qui a récompensé ce film iconoclaste a provoqué la surprise générale, face à 120 battements par minute du réalisateur Robin Campillo, on peut comprendre, après coup, le choix du jury : les différents thèmes abordés, plus la liberté d'expression, l'immigration, l'art contemporain, la lutte des classes, les limites du marketing et des communicants, etc., sans oublier le traitement choc de nombreuses scènes qui, tout en laissant le spectateur hilare, suscitent le malaise, miroir à double face qui révèle la turpitude et la faiblesse humaines enfouies en chacun, sous un vernis de civilité et de bons sentiments.

 « Le Carré est un sanctuaire où règnent confiance et altruisme. Dedans, nous sommes tous égaux en droits et en devoirs. » Ce carré illusoire explosera littéralement, tout comme la statue équestre d'un autre temps qui s'écroule au début du film, scène annonciatrice des catastrophes à venir.

Autre motif, peut-être, du choix du jury, une finale qui laisse le spectateur en plan, obligé de conclure par lui-même, de mettre un terme à la trajectoire du personnage principal, qui semble sans fin (celui-ci s'enfonce dans un tunnel routier, dans sa Lexus, avec ses deux fillettes assises sur la banquette arrière).

The Square prolonge et accentue, du côté de la Cité, le côté grinçant de Snow Therapy (Force majeure) du même réalisateur, drame qui se déroulait dans une station de ski dans les Alpes et qui interrogeait et remettait déjà en question le rôle de l’homme au sein de la famille et du monde modernes. (Prix du jury d'Un Certain Regard au Festival de Cannes 2014.)

9/10 "The Square", Ruben Ôstlund, "Comédie dramatique suédoise", "Festival de Cannes", Immigration, "Art contemporain", Marketing, Communications, "Snow Therapy", "Lutte de classes"