Femme à la mobylette, suivi de À la
recherche du sixième continent, Paris, Flammarion, 2017, 240 p.
Femme à la mobylette, 198 p.
« À la
croisée du drame social et de la fable romantique, Jean-Luc Seigle tisse le
puissant portrait d'une femme exclue, à bout de forces, sommée de résister
coûte que coûte à la violence du monde d'aujourd'hui. Se cognant aux portes
d'une société ultra compétitive, elle va trouver en l'amour l'ultime recours
d'une éphémère renaissance. » ( Estelle Lenartowicz, « Nos cinq coups de cœur de la rentrée littéraire », L’Express,
19 août 2017)
« Reine, héroïne étincelante d'une impitoyable
tragédie moderne, celle de la France des invisibles […] » (Estelle Lenartowicz)
vient d’une longue lignée de femmes. Mère de trois jeunes enfants, quittée par
son mari, sans emploi, à bout de ressources, elle est au bord du gouffre. La
découverte d’une mobylette bleue, dans la décharge de son jardin, va lui
permettre de décrocher un emploi comme thanatopractrice (embaumeuse de
cadavres) et de découvrir l’amour dans les bras d’un routier hollandais. Mais
le retour du réel…
Divisé en cinq parties : la Nuit impossible ;
les Mains inutiles ; le Premier Miracle ; le Second Miracle ; le Retour du
réel, ce roman haletant, à l’écriture qui oscille entre poésie et réalisme,
rappelant celle de Colette, conduit le lecteur sur des chemins cabossés, certes,
mais aussi dans des haltes qui lui permettent de reprendre son souffle, à l’image
de l’héroïne. Un nouveau récit dans lequel, une fois de plus, l’auteur s’imprègne
de l’univers féminin pour créer un personnage plus réel qu’imaginaire, symbole
des déshérités, des laissés pour compte, à qui la vie ne fait pas de cadeau.
À la
recherche du sixième continent, de Lamartine à Ellis Island, relation de voyage, p. 199-240.
Dans ce récit autobiographique d’un voyage à New
York, en 1995, en compagnie de sa conjointe et d’un couple d’amis, l’auteur développe
la notion de « roman populaire », dont Lamartine fut l’un des précurseurs, avec
Geneviève ou l’histoire d’une servante
et le Tailleur de pierre de Saint-Point.
En explorant ce « continent populaire », ce « sixième continent à
découvrir », il aborde la découverte et la fondation de l’Amérique par ces
millions de migrants et de migrantes qui, par le sacrifice de leur vie, le plus
souvent, ont bâti un monde qu’ils voulaient meilleur.
« Heureusement qu’elle connaît les noms de
tous les oiseaux et leurs cris. […] L’étourneau jase, la mésange zinzinule,
l’alouette grisolle, la caille carcaille, la bécasse croule, la huppe pupule, la buse piaule,
la tourterelle gémit, le canard cancane, la chouette chuinte, le hibou bouboule, le serin ramage,
la cigogne craquette, la colombe roucoule, le jars jargonne, le corbeau croasse,
la corneille corbine. Il n’y a que le
coq de basse-cour qui chante ! » (p. 35)
« Tout
finit dans l’absence et le silence absolu du monde. » (p. 38)
« Il
faut faire des choses impossibles et des choses impardonnables sinon on ne fait
rien dans la vie. » (p. 171)
« Toutes ces femmes n’ont fait que tendre
vers un seul point, toujours le même, la joie d’avoir accompli un rêve. » (p.
194)
« C’est toujours impressionnant de remarquer
– du moins dans mon cas – le peu de chose que l’on retient des livres lus et
notre incapacité à reconnaître, à repérer, tout ce que ces mêmes livres ont
déposé en nous comme sédiments. C’est à la fois un mystère et un miracle. Pourvu
que ces livres, une fois que je serai mort, remontent à la surface et viennent
de l’intérieur tatouer ma peau de parchemin […]. » (p. 206-207)
« Je me souviens d’une tombe dans le
cimetière de Bages dans l’Aude sur laquelle était écrit : « Toi qui passes
rappelle-toi nous avons été ce que tu es et tu seras ce que nous sommes. » Une
phrase sans virgule et sans point. » (p. 227)
« « Ce monde nouveau, c’est la sensibilité et
la raison des masses ! La géographie de l’univers moral ne sera complète que
quand ce continent populaire sera découvert, conquis et peuplé d’idées par les
navigateurs de la pensée. On l’entrevoit déjà ; il ne reste qu’à l’aborder. »
Ce « continent populaire » était donc le
sixième continent à découvrir. Mais il semblerait que personne encore ne l’ait
vraiment trouvé. L’abordage n’a pas eu lieu comme Lamartine devait l’imaginer
pour le siècle suivant. » (p. 237)
9/10 Jean-Luc Seigle, ʺRoman
populaireʺ, Alphonse de Lamartine, ʺNew Yorkʺ, ʺEllis Islandʺ, ʺRécit de voyageʺ,
ʺÉtats-Unisʺ, ʺDrame socialʺ, ʺFable romantiqueʺ