
Une histoire de fou, France, 2015, 134 minutes. R. : Robert Guédiguian ; Sc. : Robert Guédiguian et Gilles Taurand.
Ce film s'inspire du récit autobiographique La Bomba, de José Antonio Gurriaran, qui décrit « [...] le parcours d’un jeune journaliste espagnol qui, en 1981 à Madrid, a sauté sur une bombe posée par des militants de l’Armée secrète arménienne de libération de l’Arménie : " Il a réchappé de cet attentat à moitié paralysé. Et alors qu’il ne savait absolument rien de la question arménienne, et pour s’en sortir, il va vouloir comprendre. Il se met à travailler sur le génocide et sa négation, il lit, il se renseigne, il se documente… Et au bout de ce processus, convaincu que la cause arménienne est juste, il décide de rencontrer les responsables de l’attentat. " »
Centré sur le génocide arménien (24 avril 1915), ce film dramatique fait voir principalement les conséquences de ce génocide soixante ans plus tard, dans la communauté arménienne de Marseille et dans la famille de Hovannes et Anouch, qui y tiennent l'épicerie du quartier.
Après un début historique, fort bien maîtrisé, qui se déroule à Berlin en 1921 et qui met en scène l'assassinat du Turc Talaat Pacha par l'Arménien Soghomon Telirian et le procès de ce dernier, l'action se déplace ensuite dans le temps, à Marseille, au Liban et en Arménie, alternant les scènes familiales et communautaires, l'entraînement des jeunes recrues arméniennes, leurs attentats, ainsi que la montée de la violence aveugle qui anime certains de leurs chefs. Dans cet éternel débat entre la fin et les moyens, le jeune cycliste français, blessé gravement lors d'un attentat à Paris, témoignera dans sa chair et dans ses propos de la folie des hommes et des peuples, cherchant à comprendre et à admettre ce qui, dans un premier temps, semble incompréhensible.
Très différent des films précédents de Guédiguian, qui mettent généralement en scène des personnages que l'on retrouve d'un film à l'autre à l'intérieur de conflits sociaux, celui-ci aborde frontalement les conséquences du génocide arménien, tout en prenant partie pour les gens simples. Marseille, Ariane Ascaride et Simon Abkarian font néanmoins le pont avec la filmographie du cinéaste.
Bien que ce film puisse sembler tomber parfois dans un certain didactisme et que certaines ficelles apparaissent trop évidentes, il n'en demeure pas moins ouvert à la réflexion et à la discussion, faisant appel aux notions de mémoire, de vengeance, de justice et de pardon.
La musique et les danses arméniennes jouent non seulement un rôle majeur dans la vie des personnages, mais permettent au spectateur de mieux comprendre la résilience et la vitalité de ce peuple.
Toutefois, le titre ne rend pas vraiment justice à l'oeuvre...
8,5/10
Mots clés : Robert Guédiguian, José Antonio Gurriaran, "Une histoire de fou", "Génocide arménien", "La Bomba"